Un pas de plus dans nos investigations sur le développement de la consommation collaborative en France.
Notre série d’interviews des acteurs de cette économie collaborative se poursuit et c’est avec une « startupeuse » super dynamique installée à Bordeaux que nous allons discuter cette semaine.
Zoom sur Laure Courty Co-fondatrice et CEO-tte (prononcez si-y-hotte) de Jestocke.com, le service pionnier du stockage entre particuliers en France.
Ce que vous allez apprendre
Pour commencer, peux-tu te présenter? Quel est ton parcours ?
Je m’appelle Laure Courty j’ai 37 ans et 3 enfants. Le dernier est né avec jestocke.com !
A la suite de mes études, je me suis lancée dans l’industrie du livre. Passionnée par le monde de l’édition, j’ai travaillé dans différents secteurs pendant plus d’une dizaine d’années.
En 2012, mon conjoint est muté à Bordeaux. Je poursuis mon travail d’éditrice en freelance mais le travail en équipe me manque. Je m’intéresse déjà depuis quelques années aux enjeux de la mutation vers des supports numérique, à l’écosystème des startups en France et aux nouveaux modes de consommation PtoP.
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Qu’est-ce que Jestocke.com ? Comment ce projet est-il né ?
Jestocke.com est une plateforme de mise en relation et de location d’espaces de stockage et de garde meuble entre particuliers. Aujourd’hui, le service est disponible pour les professionnels et les entreprises également. L’idée du service est d’offrir à chacun une solution de stockage plus proche et bien moins chère.
Jestocke.com est logiquement née à la suite d’un déménagement. Nous avions une cave bien remplie à Paris ce qui ne fut pas le cas en arrivant à Bordeaux. J’ai rapidement cherché une solution pour stocker ces affaires. Je ne voulais pas d’un box en dehors de la ville, ni y affecter un budget trop important. Je n’ai pas trouvé.
Comment le projet a évolué de sa création jusqu’à aujourd’hui ?
D’abord nous avons testé le service. c’était très important de savoir si un tel modèle pouvait fonctionner pour du garde-meuble. Les affaires que l’on stocke ont pour beaucoup une valeur sentimentale. La question de la confiance et de la sécurité était primordiale. Alors nous avons cherché un partenaire assureur, suffisamment sérieux et innovant pour développer le produit d’assurance dont nous avions besoin pour nos utilisateurs. Puis il a fallu mobiliser des fonds pour développer et itérer. D’abord auprès des banques, du réseau entreprendre et de fonds propres puis avec une levée de fonds bouclée en janvier 2015 auprès d’investisseurs privés et de la région Aquitaine. Nous avons levé 350k€ avec l’ambition de poursuivre notre conquête du marché en France et de développer une solution pour les pros.
Nous avons une croissance de plus de 40% par mois sur le nombre de transactions réalisées. Aujourd’hui plus de 200 000 m 3 de garde meuble sont disponibles partout en France, ce qui permet de trouver une solution adaptée dans toutes les plus grandes villes.
Utilises-tu le service à titre personnel ?
Bien sûr, c’est évident. Dès que j’ai eu de la place, j’ai commencé à louer ma cave. Elle ne désemplit plus et je trouve ça très sympa. J’y descends tous les jours pour faire des machines et je jette un œil sur les affaires qui y sont stockées pour vérifier que tout est en ordre. Je me sens bien plus responsable de ce que l’on m’a confié que de nos propres affaires.
Quel est le business model ?
Jestocke.com prélève des frais de service compris entre 10 et 20% du montant de la location auprès du locataire. Nous fournissons les contrats de location, un service de paiement sécurisé sans frais et l’assurance est en inclusion.
Combien êtes-vous dans l’équipe et quelle est la répartition des rôles ?
Aujourd’hui nous sommes une petite dizaine. Louis Amon mon associé est directeur technique. Il chapeaute toute la partie « IT » du projet avec deux autres développeurs. Rahma Keddad qui nous suit presque depuis le départ de l’aventure se charge du marketing. 3 personnes assurent le service client via nos différents canaux. Et je viens de constituer une équipe de 2 jeunes femmes pour développer l’activité sur les professionnels.
Avez vous prévu une internationalisation ?
C’est une piste très sérieuse qu’il faut exploiter avec prudence. D’abord dans le choix du pays que l’on cible puis dans la stratégie de conquête. Nous incuberons vraisemblablement l’équipe en interne.
Comment ça se passe niveau assurance pour les utilisateurs ?
C’est un point crucial. Aujourd’hui nous n’avons aucun sinistre déclaré, ce qui est très encourageant pour la suite. Les propriétaires respectent leurs engagements et nous veillons à ce que les espaces proposés à la location soient sains.
Comment vous démarquez-vous de vos concurrents ? Le fait de vouloir vous différencier oriente-t-il vos décisions ?
Notre attention n’est pas focalisée sur la concurrence. Nous faisons de la veille mais essayons d’avoir une stratégie différenciante. Aujourd’hui, l’ouverture du service au BtoB est un positionnement original.
En quoi votre projet s’inscrit dans l’économie collaborative?
D’abord, je crois que la façon dont nous développons le projet est collaborative. C’était une priorité pour moi, travailler avec d’autres acteurs, multiplier les synergies et les passerelles. Nous participons au projet Ouishare Bordeaux aux côtés d’autres acteurs de la consommation collaborative et échangeons très souvent sur l’avenir de cette économie. Ensuite le service porte clairement en lui l’intention de voir émerger un autre modèle faisant primer l’usage sur la propriété. Des m2 sont disponibles partout dans nos grandes villes alors que beaucoup sont logés dans des appartements exigus. Jestocke.com permet de les mettre simplement en relation.
Avez-vous été inspiré par d’autres projets de consommation collaborative en vous lançant ?
Evidemment, nous avons passé beaucoup de temps à nous documenter et on continue à la faire. Ouishare recensait au moment de la création de jestocke en 2013 pas moins de 100 plateformes de consommation collaborative, il en existe plus de 200 à peine deux ans après.
Quel est ta définition de la consommation collaborative ?
Pour moi il s’agit d’abord d’un état d’esprit, d’une envie de bousculer un modèle en place et de revoir notre façon de consommer en créant du lien. Aujourd’hui, cela passe par des plateformes comme les nôtres, demain de nouveaux canaux seront inventés.
[Tweet « #consocollab, Un état d’esprit : bousculer un modèle en place et revoir notre façon de consommer »]
Comment vois-tu la future évolution de la consommation collaborative? Que penses-tu de l’avenir de l’économie traditionnelle en concurrence ?
Je le répète souvent mais je reste persuadée que nous sommes complémentaires. Aujourd’hui, il me semble assez clair que Blablacar ou Drivy bouscule violemment la SNCF. Par contre, si Renault ou PSA arrêtaient de vendre des voitures parce que plus personnes n’en achetait, le covoiturage ou la location de voiture entre particuliers disparaîtraient. C’est une évidence mais cela sous-entend que nos services sont profondément liés à d’autres industries traditionnelles.
Un supermarché, la plateforme Laruchequiditoui ou les AMAPs répondent à des priorités différentes en termes de consommation. Je n’ai pas l’impression que les supermarchés vont disparaître mais je suis certaine qu’ils vont évoluer pour intégrer d’autres exigences des consommateurs.
Pour ce qui est de notre secteur celui du stockage, nous répondons à un certain type de besoins et des synergies entre acteurs traditionnels et acteurs du web sont nécessaires. Pour moi, c’est une opportunité pour ces acteurs de se développer en intégrant des produits innovants.
Quelle initiative de consommation collaborative t’a séduit dernièrement ?
J’adore le projet Jaidemaville. C’est un site qui permet de remonter simplement et efficacement des informations aux mairies.
Merci Laure pour cet entretien, à présent si je ne sais pas où mettre mes affaires, …Jestocke 😉
Mise à jour le 14 septembre 2024